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République des tables-bancs
17 septembre 2013

Rendons grâce à l'Unicef, car nous pouvons la critiquer : (3) L'Unicef et les plaidoyers

Les droits donnent une base solide pour prononcer des plaidoyers. Voilà une posture qui distingue l’Unicef, en ce qu’elle est revendiquée et en ce qu’elle n’est pas suspendue dans le vide, mais à des droits.

La plupart des grandes agences de développement, consœurs de l’Unicef, cachent sous leur robe leur volonté d’influence politique. Chez les bilatéraux, parce qu’un affichage d’influence serait aujourd’hui démodé et politiquement faisandé ; chez les grands multilatéraux faute d’idée claire et stable vers quoi influencer les gouvernements. Seul le Partenariat mondial pour l’éducation affiche aujourd’hui des « priorités » qui lui sont propres, dont certaines du reste ne correspondent pas à des droits consacrés par des conventions et sont éloignés des accords du dernier forum mondial sur l’éducation. Le Partenariat ne plaide d’ailleurs pas, mesurant sans doute cette question de légitimité.

L’Unicef revendique sa pratique de l’influence, au nom des droits de l’enfant, la seule légitimité possible pour cela. C’est sa grande force que de plaider, elle s’en sert aussi, avec un grand succès, pour lever des fonds.

Ce rôle sympathique du plaideur pour les droits suscite malheureusement des vocations en écho. On entend des ministères de l’éducation, un peu chahutés par leurs bailleurs sur le caractère rêveur de leurs plans, répondre « bien sûr, nous n’avons pas l’argent pour payer ça, considérez ce plan comme un plaidoyer ».

Cette drôle de farce, le dévoiement du plaidoyer et son renvoi en écho à l’infini vers l’absence d’auditeur et de juge, est permise par la fragilité des droits plaidés et par la faiblesse des relais. Le droit à l’éducation donné par les conventions internationales, les lois internes et les constitutions est tellement plus grand que le réel et même que les espoirs, que personne ne croit qu’il puisse contraindre. C’est ainsi qu’il n’y a pas de plaideurs pour aller à l’essence du droit : agir pour la contrainte qui les rendrait opposables à ceux qui les ont un peu vite proclamés. Personne pour reprendre les plaidoyers de l’Unicef au nom de l’enfant untel, qui a été chassé de l’école. Pas de juge pour les entendre, juste l’humour astucieux des gouvernements qui plaident désormais à leur  propre adresse.

Une solide réflexion sur les droits pourrait donner des forces aux plaidoyers : quels sont les vrais droits qui concernent les enfants, quelles promesses couvrent-ils, quels mécanismes les sanctionnent-ils, qui les défend, enfant par enfant, dans la vraie vie ?

Un peu de ménage dans les droits proclamés, entre ceux que l’on peut et doit prendre au sérieux, et ceux qui sont dans les textes juste pour leur donner une petite touche de modernité, aiderait bien. En même temps, un travail long et minutieux sur les mécanismes institutionnels d’opposabilité pour quelques droits sérieux : ce n’est pas du discours, pas du plaidoyer, pas de la modernité, juste du travail institutionnel, long, patient, pratique. Des procédures, cela seul donne du sens à un plaidoyer.

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