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République des tables-bancs
13 juillet 2013

Abécédaire : examen

Examen

Moment solennel de l’année scolaire, l’examen exhibe en peu de jours tous les charmes de l’école et fait la une de la presse locale.  C’est le rendez-vous périodique le plus prisé qui soit entre l’école et le reste du monde. On y distribue des diplômes, supposés avoir cours dans l’ensemble de la vie sociale. Il y a des villes où la circulation s’arrête un seul jour dans l’année, celui des résultats du baccalauréat. 

Il peut bien arriver que des garnements y échouent et c’est d’ailleurs un peu pour ça qu’on les organise. On n’imagine pas en revanche qu’un Ministre défaille à les organiser, ce serait la fin de sa carrière politique. Cela doit attirer l’attention de ceux qui ont pour métier d’améliorer l’école, singulièrement en Afrique. A y bien regarder, les examens sont la seule occasion dans l’année où tout ce qu’il faut est au rendez-vous : les candidats, les surveillants, les sujets, les jurys, les papiers de copie, les listes. Ce n’est pas une mince affaire et plus d’un fonctionnaire a cru sa carrière terminée une veille de certificat d’études où il restait de l’incertain.

C’est donc qu’il est possible de tenir un calendrier, de faire les achats nécessaires à temps, d’acheminer gens et papiers là où ils sont espérés. Ce miracle ne se produit jamais ailleurs qu’aux examens. A la rentrée, il manque toujours quelque chose, parfois beaucoup de choses et des foules de gens. Pour d’autres rendez-vous administratifs, on pleure l’impossibilité des logistiques, l’indigence des crédits, la panne des services, les pluies trop précoces ou alors tardives. On va vous servir des statistiques d’avant la dernière neige, parce qu’il aura bien fallu deux ans pour ramasser les papiers, mais il ne faut pas huit jours pour les copies du certificat d’études.

Il serait donc riche d’étudier par le menu les ingrédients du miracle et de trouver ceux qui manquent aux autres travaux utiles. Est-ce l’épée de Damoclès aussi tranchante pour le  Ministre que pour le candidat du fond des brousses ? Est-ce la pression des journaux ou des cancans ? Est-ce la présence d’un candidat dans chaque famille de fonctionnaire, soumis aux examens publics à la fin d’une scolarité chez les bons pères ? Dans tous les cas, il y aurait un petit goût de comptes à rendre dans ce miracle qu’on n’en serait pas étonné, mais cela mériterait quelques investigations de détail. Ce qui est possible une fois l’an pourrait-il l’être deux fois ?

Le lendemain des résultats, l’examen est fini, le monument historique est rangé jusqu’à l’année prochaine. Il n’y aura plus qu’à délivrer les diplômes, tâche pour laquelle il se peut que l’administration retrouve un peu d’indolence. Le directeur des examens aura couru chez son Ministre déclarer le taux de réussite, une sorte de moyenne qui lui vaudra grimace ou sourire, selon. 

Toutes ces notes qui ont coûté si cher n’auront servi qu’à cela, alors qu’elles ont tant à nous dire. Les enfants qui échouent sont-ils en proportion égale partout, ou avons-nous des écoles qui échouent beaucoup ? Je me souviens d’un Ministre atterré au vu du résultats de tout un groupe de collèges, où tous les enfants s’étaient montrés nuls en maths  - c’était plutôt une bonne nouvelle, à mon avis, on avait pu vérifier que ces collèges n’avaient pas eu de professeurs de maths, tandis que si tous les candidats avaient été médiocres, nous aurions eu plus de mal à le rassurer.  Y a-t-il une discipline plus massacrante que les autres, est-ce la même tous les ans, dans toutes les villes ? Les résultats de l’examen ressemblent-ils au moins de loin à ce que les notes de l’année avaient laissé prévoir ? Pour les calculateurs d’aléas, voilà un bel exercice. Pouvez-vous décrire les hasards des examens ? Ou plutôt les réduire par calcul à quelques intuitions statistiques sur lesquelles l’administration scolaire serait appelée à plancher ? Si les calculs laissent penser que les résultats d’examen résistent à toute analyse statistique, il faudra tracasser les pédagogues ; mais s’ils ouvrent la porte à des explications locales (il y a des écoles qui ne fonctionnent pas), à des questions d’effectifs (vous pensez, à cent par classe) ou d’équipement, on saura au moins quel genre de travail reste à faire.

Beaucoup à gagner à examiner les examens, donc. Une seule condition semble le permettre, ce serait que les administrations se soumettent une fois l’an à leur propre examen.

 

 

 

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