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République des tables-bancs
10 septembre 2013

Abécédaire : la routine

Routine

Il y a quelques années, un directeur provincial de l’éducation en Guinée Conakry m’a déclaré fièrement «  nous n’avons plus de routines, nous avons une stratégie ». Je n’ai pas partagé son enthousiasme et je me pose depuis ce temps la question de savoir si une administration sans routines peut avoir une stratégie. La réponse est probablement négative.

La routine est tout l’intérêt de la bureaucratie – oublions maintenant les connotations péjoratives de ces deux mots, pour retenir ce qu’ils désignent et non ce qu’ils évoquent. La bureaucratie est le simple fait de standardiser des actes de gestion, de façon à pouvoir les répéter à l’identique autant de fois que nécessaire, à créer des routines. Cela a deux mérites.

D’abord, c’est très économe en intelligence, puisqu’on n’invente qu’une fois pour toutes le procédé de gestion, par exemple la façon d’affecter un instituteur, la préparation de la rentrée, la rédaction des sujets d’examen ou tout autre acte qui se répète avec régularité. Il n’y a pas besoin, à chaque fois, de se demander à nouveau comment il faut faire. Une seule première fois. La hiérarchie décisionnelle n’intervient que pour aménager le procédé si nécessaire et éventuellement pour régler un cas particulier qui ne se laisse pas traiter par le procédé ordinaire. Tout le reste relève du middle management, des agents administratifs intermédiaires qui exécutent avec ordre des procédés connus et explicites.

Ensuite, cela donne un peu de garanties que des cas similaires vont être traités de façon identique, c’est à dire avec les mêmes critères, les mêmes délais, les mêmes documents, par les mêmes responsables.

Le contraire de la routine, tel qu’on l’observe, relève de la gestion par opportunité ou de la gestion des urgences. Flou du cadre, décisions hors délais (comme en témoigne généralement l’ensemble de la préparation de la rentrée scolaire et les affectations d’enseignants), contestations, jeu important des capacités relationnelles des cadres et des agents caractérisent ce mode de gestion non bureaucratique.

Et la stratégie ? Par sa nature, elle est anticipation. La dessiner et l’expérimenter suppose des cadres détachés de l’action quotidienne. Il faut donc que des routines aient pris ce quotidien en charge. La stratégie nécessite aussi que l’administration ait une prise assez ferme sur ses principales fonctions, sans quoi elle sera bien en peine de les orienter dans une direction nouvelle. Si l’opportunité et l’urgence président aux décisions, l’administration est en position d’attente, à l’exact opposé d’une position stratégique.

Non seulement la stratégie ne remplace pas les routines, mais elle n’a pas de chance d’exister sans elle. C’est précisément le faible des stratégies sectorielles, que de ne pas faire le tour des routines nécessaires et de celles qui défaillent.

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  • Blog à deux voix. Celle de François Robert, consultant indépendant en éducation. Celle de Robert François, voyageur fasciné par le continent noir. Ces deux voix parlent de l’Afrique et de son école, mais pas seulement.
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